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Les neutrons polarisés aident à percer les mystères des skyrmions

Une étude récente, publiée dans Science and Technology of Advanced Materials et menée à l'Institut Laue-Langevin (ILL), a utilisé la diffusion de neutrons polarisés sur l'instrument D33 pour explorer les skyrmions. Cette recherche a fourni des informations microscopiques cruciales sur ces structures magnétiques. D33 reconnu pour sa capacité unique à combiner des champs magnétiques intenses et des neutrons polarisés, a été essentiel pour comprendre les transitions de phase des skyrmions. Ces découvertes microscopiques ne sont pas seulement fondamentales : elles permettent le développement de dispositifs spintroniques à base de skyrmions. Ces technologies pourraient révolutionner le stockage de données et la consommation d'énergie, offrant des solutions bien plus efficaces. Les méthodologies utilisées dans cette étude pourraient aussi s'appliquer à d'autres matériaux magnétiques. Cela permettrait de découvrir de nouveaux phénomènes et de développer de matériaux magnétiques encore plus performants.

Les particules subatomiques, les noyaux et les atomes possèdent des propriétés intrinsèques telles que leur masse ou leur charge. Ils se caractérisent également par leur spin, qui correspond à un moment angulaire.

Les vortex de spins, appelés skyrmions, sont des candidats prometteurs pour des applications dans les dispositifs spintroniques. En exploitant le spin des électrons, la spintronique peut stocker plusieurs bits d'information sur un seul domaine magnétique et ne nécessite pas de mouvement d'électrons pour le transport de l'information. Ceci contraste avec les options de stockage de données actuelles où des domaines de stockage distincts sont utilisés pour chaque bit.

Les dispositifs spintroniques devraient donc être plus efficaces pour stocker des données tout en consommant moins d'énergie que les options actuellement disponibles sur le marché.

Dans cette perspective prometteuse, les skyrmions du matériau magnétique multicouche [Pt(1 nm)/(CoFeB(0.8 nm)/Ru(1.4 nm)]10 ont été étudiés par un groupe de chercheurs de l'ILL, grâce à la technique de diffusion de neutrons aux petits angles (DNPA) sur l'instrument D33.

« Nous avons constaté que les skyrmions étaient moins stables à des températures inférieures à 250 K (environ -20°C). Nous attribuons cette observation à l'anisotropie magnétique de la couche de CoFeB au sein de cette structure multicouche complexe », explique Victor Ukleev, premier auteur de l'étude. L'équipe n'a, par ailleurs, observé qu'un seul type de skyrmions : les skyrmions de type Néel. Dans ce type de skyrmions, les spins tournent dans des plans radiaux, du centre vers la périphérie du skyrmion. Cela contraste avec les skyrmions dits de type Bloch, où les spins tournent perpendiculairement à leurs directions radiales. « Nous avons été ravis de voir que ces résultats concordent bien avec les modèles théoriques de tels systèmes », ajoute Victor Ukleev.

Ces découvertes apportent des informations détaillées et très importantes sur la structure et les propriétés des matériaux candidats pour les dispositifs spintroniques. « L'environnement échantillon hautement spécialisé et les caractéristiques de D33, notamment son excellente aptitude aux expériences utilisant des neutrons polarisés, sont cruciaux pour ce type d'expérience », souligne Robert Cubitt, scientifique à l'ILL et principal responsable de D33.


Instrument ILL : D33 

Référence: Ukleev, V., Ajejas, F., Devishvili, A., Vorobiev, A., Steinke, N. J., Cubitt, R., … White, J. S. (2024). Observation by SANS and PNR of pure Néel-type domain wall profiles and skyrmion suppression below room temperature in magnetic [Pt/CoFeB/Ru]10 multilayers. Science and Technology of Advanced Materials, 25.

https://doi.org/10.1080/14686996.2024.2315015

Contacts ILL:  Nina-Juliane Steinke, Robert Cubitt